Revue des événements du deuxième trimestre 2015


Le deuxième trimestre fut tout aussi riche en événements que le premier. Il débuta avec un événement "macabre": Le "charnier de Maluku" ou "Enterrement collectif" - tout depend dans quel camp on se trouve- pour finir sur une touche plus politique avec la question du dialogue. Mais il y eut aussi le dépôt des candidatures pour les élections provinciales et malheureusement l'insécurité persistante dans la ville de Beni dans le Nord-Kivu. 
Pour cette revue, nous avons catégorisé les événements en vue d'une meilleur lecture et compréhension. 

Sécurité 

- L’insécurité dans la ville de Beni. Cette dernière a continué à payer le prix fort d’une recrudescence de l’insécurité attribuée aux éléments des ADF-NALU. Plusieurs manifestations et opérations "ville morte" ont été organisées pour dénoncer cette insécurité et réclamer une implication bien plus sérieuse du gouvernement. Une population qui a aussi réclamé le remplacement du commandement des FARDC dans la région. 

- Lutte contre les FDLR, Depuis le lancement des opérations, très peu de résultats n’ont été observées depuis le lancement. Les Fardc ont progressé sur le terrain, mais depuis plusieurs semaines, c’est le silence radio. On ne saurait donner l’exacte progression de cette opération sur le terrain. 
Sur ce dossier, nous avons pu observer un début de reprise de dialogue entre le gouvernement et la Monusco. 

Société/Politique


Cimetière de Maluku
- Le charnier de Maluku/Fosse commune de Maluku/Enterrement collectif de Maluku etc. ce sont les diverses noms qu’a pris cette affaire autour de l’enterrement, quasi clandestins, de 425 corps dans la commune de Maluku. Ce fut l’un des évènements les plus importants du deuxième trimestre de l’année. Pendant plusieurs semaines, opposition et société civile ont accusé le pouvoir de procéder à des enterrements clandestins des victimes de la répression policière des manifestations de janvier 2015 et des opérations LIKOFI de 2014.
Il s’en est suivi une campagne de communication à travers laquelle le gouvernement a essayé de reprendre la main dans ce dossier et de convaincre  l’opinion nationale et internationale de sa version. Trois  points marquèrent cette campagne : l’annonce du ministre de la Justice Tambwe Mwamba aux ambassadeurs accrédités en RDC, La journée « portes ouvertes a la morgue centrale » et la médiatisation d’un autre enterrement collectif.
L’opposition a tenté d’avoir la tête d’Evariste Boshab à travers une motion de défiance qui fut bloquée par la majorité.

Malheureusement, de cette affaire la lumière ne fut jamais faite, ni sur la procédure entourant ces «opérations de routine d’enterrement d’indigents».
Une enquête, qui est toujours en cours, a été ouverte par le parquet général pour déterminer les contours de cette affaire. Les conclusions se font toujours attendre.

Politique 

Jean Pierre Bemba-Vital Kamerhe- Felix Tshisekedi
- Dialogue politique : Indéniablement il s’agit du fait le plus marquant de ce deuxième trimestre 2015. Joseph Kabila a initié une série de contact avec les partis de l’opposition en vue d’un dialogue politique. L’UNC, le MLC et alliés ont réservé une fin de non-recevoir au chef de l’Etat. Il faudrait signaler que la position de l’opposition fut en phase et influencée par la situation au Burundi voisin. En effet, l’UNC posa des conditions comme préalables a la tenue d’un  quelconque dialogue. Elle changea son fusil d’épaule après le coup d’Etat manqué au Burundi et le jusqu’auboutisme des opposants au régime de Pierre Nkurunziza. Changement de position que certains dans l’opposition de manquent pas de leur rappeler. 
L’Udps, conduit par Felix Tshisekedi, au grand dam de plusieurs caciques du parti, avait dans un premier temps, pris les devants et donner son accord à un dialogue, avant de se rebiffer. Un revirement consécutif aux consultations initiées par le président de la République.

Dialogue ou consultation, l’idée ne fait pas l’unanimité au sein de la classe politique. Son format, son contenu et ses objectifs ne sont pas connus.
Et donc, l’opposition radicale, conduite par UNC, ne veut pas en entendre parler, car pour elle il s’agit d’une énième stratégie de la majorité pour se soustraire aux élections de 2016.

En effet, il faut reconnaître qu’un dialogue pourrait être une énième tentative de la majorité d’éviter les élections en 2016 et maintenir Joseph Kabila au delà des délais constitutionnels. Mais face à la situation actuelle, la question qu’il faudrait se poser est celle de savoir si oui ou non la classe politique congolaise devrait elle se passer de ce dialogue et aller droit aux élections ?
Les risques d’un glissement  du calendrier électoral, tant redouté par l’opposition, sont réels. Les craintes d’une instabilité pré et post-électorale sont tout aussi justifiées. Face à un homme qui a pris le pouvoir dans les circonstances que nous connaissons et qui l’a maintenu quinze durant, pouvons-nous nous permettre l’économie d’un dialogue à la veille d’élections supposées lui ouvrir la porte de sortie ?!  

- Le dépôt des candidatures pour les élections provinciales. La CENI tient au respect de son calendrier sans tenir compte des réclamations l’opposition. Ainsi elle lança les opérations d’enrôlement des candidatures pour les provinciales. Initialement prévu du 15 Avril au 5 Mai, la date de clôture fut reportée à deux reprises pour enfin prendre fin au 30 Mai 2015.
Sur ce chapitre des divergences furent constatées au sein de l’opposition qui ne parvint pas à se mettre d’accord  sur la participation ou pas à ces échéances électorales. Certains, comme  les FAC de Martin Fayulu, posent comme conditions sine qua non la modification du calendrier électoral et l’enrôlement des nouveaux majeurs par la CENI. D’autres par contre, bien qu’opposes au calendrier électoral, ont déposé leurs candidatures et sont prêts à y participer.


Freddy Matungulu, president de "Congo na Biso"

- Les potentiels candidats pour la présidentielle de 2016 font de plus en plus parler d’eux.
Deux se démarquent du lot des non-affiliés.
Le premier, Freddy Matungulu Mbuyamu est finalement sorti du bois et a fini par créer un parti politique “Congo na Biso”. Après plusieurs tribunes et interventions médiatiques, qui ne laissaient aucun doute quant à ses ambitions présidentielles, l’ancien fonctionnaire du FMI a fini par tomber le masque. Son retour au pays se fait attendre pour une annonce officielle.




Dr Denis Mukwege

Le deuxième, c’est le docteur Denis Mukwege. Le dernier prix Sakharov et récent "Docteur Honoris Causa" de l'université d'Harvard, s’est montré très actif ce deuxième trimestre. Contrairement aux autres, ses sorties médiatiques restent prudentes dans leur ton, et  ne s’adressent pas directement au pouvoir. Il aborde les questions qui ont été longtemps posées comme les sources de l’instabilité de la RDC.  Et son public premier, pour l’instant, demeure la société civile et les milieux intellectuels et politiques européens. Tour à tour il a abordé la question de la certification minérale en zone de conflit, des élections de 2016, du drame de l’immigration en mer Méditerranée et tout récemment des FARDC impliqués dans le viol des femmes. Plusieurs articles ont été publiés sur lui dans plusieurs medias occidentaux de premier rang.
De toutes ses interventions, il faudra retenir le concept de “Révolution morale”, un concept qui pourrait devenir le message central de sa campagne.
Mais quant à sa candidature, jusque là c’est le silence total. Il balaie, timidement, d’un revers de la main les supputations autour de la question. Mais les signes de sa participation ne trompent pas. 
Il suffit de lire entre les lignes de son activisme et du support à peine voilé de la diplomatie européenne, pour vite reconnaitre en lui le choix de l’UE pour la présidentielle de 2016.
Adolphe Muzito

A l’intérieur du pays, c’est Adolphe Muzito, ancien premier ministre qui s’est, à l’instar de Freddy Matungulu,  lancé dans le jeu des publications des tribunes, essentiellement économiques, visant la politique économique du gouvernement. Le PALU préparerait-il son candidat pour 2016? 





Dans les prochains mois, nous devrions assister à une activité médiatique de plus en plus intense de plusieurs potentiels candidats. Jusque là, ce sont les non-affiliés- qui se lancent dans la bataille des idées en s’attaquant aux choix politiques et économiques du pouvoir en place. Ils sont loin de la bataille qui se déroule autour du calendrier électoral et d’autres contraintes liées à la CENI. 
Leur stratégie de communication se démarque très sensiblement des opposants internes. En effet, ils privilégient une approche qu'on pourrait qualifier de scientifique en indexant les problemes et choix socio-politico-économique du gouvernement et y proposent, timidement, des solutions. 
La question est celle de savoir combien de temps pourront-ils tenir dans cette position. Des trois candidats cités, le docteur Mukwege est celui qui se retrouve dans la position la plus délicate. Et il devra faire preuve de beaucoup de prudence et d'intelligence pour ne pas se mettre à dos le pouvoir en place, qui certainement ne se fait plus aucun doute sur les ambitions du docteur, du moins de ses parrains européens. 
  

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