Report des élections des nouveaux gouverneurs, une nouvelle étape vers le glissement

Avec le report sine-die de l'élection des gouverneurs des nouvelles provinces, une autre étape vers le "glissement" vient d'être franchie. Au delà des contraintes techniques que pose cette élection, il se pose déjà un casse-tête politico-légal. Les actuelles assemblées provinciales, supposées donner naissance aux nouvelles assemblées provinciales qui, elles, doivent élire les nouveaux gouverneurs, sont elles-mêmes hors délais constitutionnelles et souffrent d'une crise de légitime. Ainsi on voit mal comment elles pourraient donner naissance à des assemblées provinciales "légitimes".
C'est dans cet imbroglio technico-légal que la CENI a décidé de reporter sine-die l'élection des nouveaux gouverneurs. Dans les jours a venir, elle va publier un nouveau calendrier électoral qui est supposé tenir compte de l'évolution de la situation.

Ainsi au stade où nous en sommes, il faut le dire et l'assumer, le glissement voulu par la majorité au pouvoir est effectif.
Et donc tout discours qui irait dans le sens d'un respect mordicus des délais constitutionnels n'a plus lieu d'être. Le respect des délais constitutionnels, tout en maintenant intact et légitime l'architecture politico-légale du pays, est simplement impossible.
Ceux qui croient encore au discours de l'Udps qui dit être prête à aller au dialogue tout en respectant les délais constitutionnels, doivent déchanter, l'Udps les trompe. La pilule est amer mais il faudra l'avaler.
Malheur à l'opposition, elle n'a pas su garder et bâtir sur le momentum des événements de Janvier dernier. Elle n'a pas su garder le peuple en alerte pour contrecarrer toutes les stratégies de la majorité afin d'éviter le glissement.
Le "glissement" s'est construit, il a été pensé et organisé. Comme tout projet, il avait été bâti en étapes. Des étapes que la majorité s'est évertué à mettre en place et réaliser. 
L'opposition, elle, dans sa stratégie s'est focalisée, avec elle la population, sur l'objectif finale qu'est le dépassement du mandat présidentiel. Elle a gardé ses yeux rivés - quasiment une idée fixe - sur les élections législatives et la présidentielle. Cette dernière étant le saint graal. 
Mais malheureusement, elle n'a pas su mobiliser la seule arme à sa disposition, la population, pour bloquer chaque étape qui construisait et conduisait vers le glissement tant redouté.
Il y a quelques mois, je dénonçais déjà les limites stratégiques de l'opposition dans son combat contre le pouvoir en vue d'éviter le glissement.
Puisque les manifestations populaires, comme celles de Janvier, se sont avérées être la seule stratégie viable de l'opposition pour faire reculer le régime, et la stratégie du glissement étant comparable à un marathon avec obstacles, il lui aurait alors fallu maintenir cette approche sur chaque étape de la course. Maintenir la population congolaise dans un état perpétuel de révolte allait s'avérer être une tâche ardue et compliquée. Quasiment impossible. L'opposition n'aurait pas pu faire descendre la population dans la rue à chaque discussion de loi ou décision politique qui s'inscrivait dans la stratégie du glissement.

... Et nous y voilà...
Aujourd'hui, le glissement doit être assumé par tous les protagonistes et la population y compris, à moins qu'elle n'en décide autrement.
Une observation rationnelle de la situation démontre que les conditions optimales pour des élections apaisées, un passage de pouvoir pacifique et la viabilité d'un prochain régime, n'étaient pas réunies, et ce dès le départ. Non seulement le processus électoral en lui-même était biaisé, mais le contexte socio-politique dans lequel ce processus prenait place est vicié dès son origine. Origine viciée qui trouve son origine dans une "transition 1+4", mal conçue - à dessein- bâclée et qui a complètement échoué.
Dans une prochaine analyse, nous ferons un diagnostic de cet échec et de ses conséquences sur la suite des événements.
Aujourd'hui, le dialogue s'impose, malheureusement pour l'opposition, à tous. Les acteurs politiques congolais vont devoir dialoguer.
Aller au dialogue et entériner le glissement ne doit être considéré que pour ce qu'elle est, une bataille perdue et rien de plus. 
Pour reprendre la main, l'opposition devra aller au delà de ses dissensions internes et vaincre les crises d'égo qui la caractérisent, afin d'aller à ce dialogue en un front commun avec un agenda et des objectifs communs. Sans cela, elle subira une autre défaite qui, elle, sera bien plus lourde de conséquences.

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